Le système éducatif au Cameroun

D’après l’UNESCO1, trois enfants sur dix ne poursuivent pas l’école au delà du primaire malgré une population scolarisée en hausse constante. Comprendre le système éducatif du pays revient à comprendre les difficultés que les élèves traversent aujourd’hui.  

Dans ce pays d’Afrique de l’ouest, la population est de 25 millions d’habitants dont près de 10 millions sont âgés de moins de 14 ans2. L’enjeu de la scolarisation concerne ainsi près de la moitié de la population camerounaise. Après une entrée à l’école maternelle à 2 ans, l’enseignement primaire dès 4 ans est fondamental pour tout jeune camerounais. Au bout de six années d’études, les élèves obtiennent le Certificat d’Etude Primaire (CEP), ou le First School Leaving Certificat (FSLC) les préparant à une formation professionnelle ou à l’entrée au collège. Pourtant, le système éducatif est affaibli et se confronte à de nombreux défis : le bilinguisme de la formation, le coût de la scolarité ou encore la qualité de l’apprentissage creusent encore aujourd’hui les inégalités. 

Un accès inégal à l’éducation, qui reste à la charge des familles 

Depuis le début des années 2000, le gouvernement camerounais met en place une politique de gratuité de l’éducation primaire en supprimant les frais d’inscription3. Toutefois, deux problèmes persistes. Tout d’abord, il faut relever qu’en milieu urbain comme en milieu rural, l’offre éducative reste insuffisante. Le manque d’infrastructure, d’enseignants et de matériel se fait sentir dans l’ensemble du pays. Par conséquent, la surpopulation dans les salles de classe n’est pas un phénomène rare : plus de 100 élèves pour un seul enseignant. En revanche, cela concerne en majorité les établissements publics. Aux côtés de ces derniers, les écoles privées se répandent largement dans le pays mais restent accessibles seulement pour les plus aisés, principalement en zone urbaine. 

Deuxièmement, le gouvernement n’a pas réduit le reste des frais liés à la scolarisation tels que l’inscription aux examens, les cotisations des associations de parents d’élèves, les manuels scolaires ou encore les uniformes. Les ménages assument alors une part croissante de la dépense d’éducation quand la part des administrations tend à décroitre. En 2018, les dépenses d’éducation représentent 17% des dépenses de l’état soit 3% du PIB4, un chiffre bien inférieur aux standards du Partenariat Mondial pour l’Education (6% du PIB).En mars 2020, une étude étude du ministère de l’Economie de la Planification et de l’Aménagement du territoire démontre que les dépenses des ménages pour l’éducation des enfants représentent près de 10% de leurs dépenses globales5.

Cette problématique des frais directs et indirects de la scolarisation a des conséquences importantes. Ainsi, les profondes inégalités sociales du pays se reflètent dans les parcours scolaires des enfants : le décrochage scolaire est récurent dans les milieux populaires, traditionnels et ruraux. 

Entre primaire et secondaire, le décrochage scolaire reste récurent 

Raisons économiques, culturelles ou démographiques poussent de nombreux élèves à arrêter l’école à la fin du CM2. Que ce soit pour les parents, la communauté, le personnel éducatif ou les enfants eux-mêmes, le décrochage scolaire est une solution inévitable pour certains élèves6

En premier lieu, les frais de scolarisation poussent les enfants à travailler, ce qui nuit à la poursuite de leur éducation. Ce phénomène renforce d’ailleurs les stratégies éducatives différenciées héritières de dynamiques socio-culturelles discriminatoires, notamment envers les jeunes filles. D’autre part, la qualité de l’environnement d’apprentissage (l’enseignement, les infrastructures, le matériel) joue un rôle non négligeable. Les populations rurales sont les plus touchées par ce phénomène. De surcroit, l’offre publique ne garantit pas un accompagnement pour les enfants issus de milieu défavorisé, ayant un statut familial particulier ou présentant un handicap. Enfin, les normes de genre discriminent particulièrement les jeunes filles, pour qui le mariage précoce ou le travail domestique reste une réalité dans certaines régions. 

Un système bilingue au coeur d’une crise politique 

Héritage de la colonisation franco-anglaise, le système éducatif camerounais est subdivisé en deux sous-systèmes anglophone et francophone, avec huit régions francophones pour deux régions anglophone7. Bien qu’il demeurait une certaine stigmatisation de l’anglais, le développement de l’offre bilingue avait pourtant permis un engouement des populations francophone pour l’éducation anglophone réputée rigoureuse. Aujourd’hui, la crise politique anglophone creuse de nouvelles inégalités. 

Depuis 2017, l’éducation des enfants se retrouve au coeur d’un conflit entre séparatistes et gouvernement camerounais. Le boycott des écoles a un impact important pour les enfants des régions anglophones et vient renforcer les difficultés d’accès à une scolarisation de qualité pour de nombreux élèves. 

Ainsi, l’objectif de Skoole est de combler les disparités d’accès à une éducation de qualité, pour tous, partout. 

Notes :

  1. Education et alphabéstisme, Cameroun, Unesco.
  2. Education et alphabéstisme, Cameroun, Unesco.
  3. Le système éducatif au Cameroun, Casea Asso, 12 janvier 2015.
  4. Education et alphabéstisme, Cameroun, Unesco.
  5. “Dépenses des ménages : 9 à 10% des revenus consacrés à l’éducation des enfants”, Actu Cameroun, 10 mars 2020.
  6. Rapport régional, Afrique de l’Ouest et du centre, UNICEF, 2014.
  7. Cynthia Petrigh, “Education et pouvoir dans le conflit anglophone”, Notes de l’IFRI, IFRI, juin 2020.

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